(Ce texte aurait dû être lu par Eric Guirado, réalisateur)
Texte cosigné par le Collectif national pour l'action culturelle cinématographique, l'AFCAE – Association française des cinémas d’ art et essai et le SCARE – Syndicat des cinémas d'art, de répertoire et d'essai –, proposé à la lecture le soir de la cérémonie des César que l’Académie des arts et techniques cinématographiques n’a pas souhaité voir lu de manière officielle.
Depuis plus de cinquante ans, le cinéma français fait figure d’exception. Et, comme vous le savez, cette exception fait référence.
Au regard de ses succès et de l’extraordinaire diversité cinématographique que connaît notre pays, ce système a fait la preuve qu’un modèle de régulation et d’accompagnement public de nature à faciliter une véritable dynamique d’innovation et de pluralité des expressions.
Mesdames, Messieurs, aujourd’hui, il est bel et bien question à nouveau de politique culturelle. Oui, encore...
Mais est-ce que le mot culture a finalement toujours sa place aujourd’hui dans la grande famille cinéma ?
La question se pose de manière cruelle...
Depuis quelques mois, nombre d’entre nous subissons une remise en cause de ce qui fonde notre engagement collectif et public en faveur du cinéma, de sa création et de sa rencontre avec tous les publics.
Des dizaines de festivals, l’ensemble des réseaux de diffusion art et essai et de recherche, et de très nombreuses associations culturelles et d’éducation à l’image, plus de 1000 cinémas et villes concernés sont aujourd’hui fragilisés par des baisses de financements importantes.
Sans aucune concertation sont remises en cause les politiques de proximité qui forment le maillage exceptionnel de la diffusion, de l’éducation artistique et de l’action culturelle.
Comment qualifier ces mesures lorsqu’on les confronte aux déclarations du chef de l’Etat sur la priorité à accorder à la « démocratisation culturelle » et à « l’éducation artistique » ?
Comment ne pas y voir un nouveau symptôme du décalage entre les effets d’annonce d’une part, les faits et les pratiques d’autre part ?
Qui diffusera bientôt sur tout le territoire Resnais, Kiarostami, Godard ou Ferran, ou, pour ne parler que de quelques-unes des premières oeuvres nominées cette année, qui s’attachera à accompagner Et toi t’es sur qui ?, Naissance des pieuvres ou encore Persépolis et Tout est pardonné ? Qui s’intéressera encore au Fils de l’épicier ?
Qui défendra notre travail de création cinématographique si l’on détricote le travail de celles et ceux qui défendent le cinéma au plus près de nous tous ?
Dans le même mouvement – faut-il y voir une simple coïncidence ? – certains opérateurs multiplient les attaques juridiques et médiatiques ainsi que les pressions commerciales à l’encontre de cinémas indépendants, qu’ils soient publics ou privés.
Que ces attaques, qui, par delà les exemples du Méliès à Montreuil et du Comedia à Lyon visent à fragiliser toutes les aides publiques au cinéma, et surviennent à l’heure de la révolution numérique ne saurait être un hasard.
Le Médiateur du cinéma lui-même écrivait dans son dernier rapport, je cite : « Le risque d’un cinéma à plusieurs vitesses est devenu une réalité, une réalité qui pourrait, si l’on y prenait garde, remettre en cause la tradition de diversité et le principe de solidarité qui fondent notre vie culturelle ». Fin de citation.
Ces menaces sont vécues comme autant de signes supplémentaires d’une volonté de démantèlement de ce qui fonde l’exception culturelle et le modèle d’intervention publique français.
Ce soir, NOUS, réalisateurs, créateurs, producteurs, distributeurs, exploitants, passeurs et acteurs de l’action culturelle cinématographique... déclarons que :
Remplacer le principe de l’exception culturelle par celui de la sanctification de la libre concurrence revient de fait à légitimer la raison du plus fort.
Ainsi, de la production à l’exploitation, en passant par les structures d’éducation à l’image, on pourrait défaire en 60 jours, ce qui a été accompli patiemment en 60 ans.
Il faut au contraire poursuivre et rénover une politique d’ambition, qui défende l’intérêt général des oeuvres, des territoires et des spectateurs.
C’est le sens de la mobilisation réalisée dans de très nombreuses salles de cinémas, à partir de ce soir durant cette cérémonie, pour alerter sur ces menaces à la fois les élus, les médias, l’ensemble de la profession ainsi que le public et pour demander des clarifications aux pouvoirs publics.
Il n’en va pas seulement de l’avenir du cinéma, si indispensable à notre imaginaire, à notre Culture, et à la cohésion sociale de nos territoires. C’est aussi un enjeu de civilisation.
Texte cosigné par le Collectif national pour l'action culturelle cinématographique, l'AFCAE – Association française des cinémas d’ art et essai et le SCARE – Syndicat des cinémas d'art, de répertoire et d'essai –, proposé à la lecture le soir de la cérémonie des César que l’Académie des arts et techniques cinématographiques n’a pas souhaité voir lu de manière officielle.
Depuis plus de cinquante ans, le cinéma français fait figure d’exception. Et, comme vous le savez, cette exception fait référence.
Au regard de ses succès et de l’extraordinaire diversité cinématographique que connaît notre pays, ce système a fait la preuve qu’un modèle de régulation et d’accompagnement public de nature à faciliter une véritable dynamique d’innovation et de pluralité des expressions.
Mesdames, Messieurs, aujourd’hui, il est bel et bien question à nouveau de politique culturelle. Oui, encore...
Mais est-ce que le mot culture a finalement toujours sa place aujourd’hui dans la grande famille cinéma ?
La question se pose de manière cruelle...
Depuis quelques mois, nombre d’entre nous subissons une remise en cause de ce qui fonde notre engagement collectif et public en faveur du cinéma, de sa création et de sa rencontre avec tous les publics.
Des dizaines de festivals, l’ensemble des réseaux de diffusion art et essai et de recherche, et de très nombreuses associations culturelles et d’éducation à l’image, plus de 1000 cinémas et villes concernés sont aujourd’hui fragilisés par des baisses de financements importantes.
Sans aucune concertation sont remises en cause les politiques de proximité qui forment le maillage exceptionnel de la diffusion, de l’éducation artistique et de l’action culturelle.
Comment qualifier ces mesures lorsqu’on les confronte aux déclarations du chef de l’Etat sur la priorité à accorder à la « démocratisation culturelle » et à « l’éducation artistique » ?
Comment ne pas y voir un nouveau symptôme du décalage entre les effets d’annonce d’une part, les faits et les pratiques d’autre part ?
Qui diffusera bientôt sur tout le territoire Resnais, Kiarostami, Godard ou Ferran, ou, pour ne parler que de quelques-unes des premières oeuvres nominées cette année, qui s’attachera à accompagner Et toi t’es sur qui ?, Naissance des pieuvres ou encore Persépolis et Tout est pardonné ? Qui s’intéressera encore au Fils de l’épicier ?
Qui défendra notre travail de création cinématographique si l’on détricote le travail de celles et ceux qui défendent le cinéma au plus près de nous tous ?
Dans le même mouvement – faut-il y voir une simple coïncidence ? – certains opérateurs multiplient les attaques juridiques et médiatiques ainsi que les pressions commerciales à l’encontre de cinémas indépendants, qu’ils soient publics ou privés.
Que ces attaques, qui, par delà les exemples du Méliès à Montreuil et du Comedia à Lyon visent à fragiliser toutes les aides publiques au cinéma, et surviennent à l’heure de la révolution numérique ne saurait être un hasard.
Le Médiateur du cinéma lui-même écrivait dans son dernier rapport, je cite : « Le risque d’un cinéma à plusieurs vitesses est devenu une réalité, une réalité qui pourrait, si l’on y prenait garde, remettre en cause la tradition de diversité et le principe de solidarité qui fondent notre vie culturelle ». Fin de citation.
Ces menaces sont vécues comme autant de signes supplémentaires d’une volonté de démantèlement de ce qui fonde l’exception culturelle et le modèle d’intervention publique français.
Ce soir, NOUS, réalisateurs, créateurs, producteurs, distributeurs, exploitants, passeurs et acteurs de l’action culturelle cinématographique... déclarons que :
Remplacer le principe de l’exception culturelle par celui de la sanctification de la libre concurrence revient de fait à légitimer la raison du plus fort.
Ainsi, de la production à l’exploitation, en passant par les structures d’éducation à l’image, on pourrait défaire en 60 jours, ce qui a été accompli patiemment en 60 ans.
Il faut au contraire poursuivre et rénover une politique d’ambition, qui défende l’intérêt général des oeuvres, des territoires et des spectateurs.
C’est le sens de la mobilisation réalisée dans de très nombreuses salles de cinémas, à partir de ce soir durant cette cérémonie, pour alerter sur ces menaces à la fois les élus, les médias, l’ensemble de la profession ainsi que le public et pour demander des clarifications aux pouvoirs publics.
Il n’en va pas seulement de l’avenir du cinéma, si indispensable à notre imaginaire, à notre Culture, et à la cohésion sociale de nos territoires. C’est aussi un enjeu de civilisation.